Ta peau…

Ta peau

Disloque l’atome

Disloque Athènes

Disloque l’altière espérance

Et le ricanement des gonds dans l’immeuble trouble ma fumée d’une ancienne présence

 

Il y a de l’ammoniac évaporé dans les carreaux

De la laitance

De l’amer

Du lacrymal surtout

 

J’ai un peu dormi

 

J’ai trouvé ton odeur dans un coin de la bibliothèque

Diffuse

Lointaine

Fanée

Craquelée

Tordue comme la main arthritique d’une statut de plâtre

 

Le foutre

La salive

L’urine

Le pus

Et à bien des lustres une tignasse baignant dans le parquet

 

J’ai mal dormi

 

J’ai trouvé ta photo sous une bible cornée

Sombre

Passée

Tachée

Déchirée aux coins comme prise au coin de ta rue

 

Pituitaire par chaque cellule

Le prurit d’une carie au plexus macère la bile au mur

 

J’ai beaucoup fumé

 

J’ai trouvé ton mégot dans le désordre

Le filtre

Le papier

Le tabac

C’est ensuite que le monde par la persienne s’est consumé

 

Les oiseaux sont tombés

Les nuages écimaient les peupliers

Dépeuplé

Déserté

Aride

Stérile

Vicié

Le quartier était tranquille comme peut-être toi en ce moment

 

J’ai pensé à ce que tu penses

 

J’y ai échoué

Ta main

La peau de ta main

Forme une croûte douloureuse à la surface des choses

 

Et je n’ai pas d’appétit

 

Ma gorge racle en brûlant et craque quand je déglutis

Tiraille

Coince

Saigne

J’écris seulement ce qui s’articule sans suintement

 

La douleur

La peine

L’obscurité

 

J’ai trop bu

 

Plus de glace

Plus d’alcool noyé

Juste le feu

Le rugueux

L’odieux

Ce qui dissout le cartilage dans les veines et les nerfs dans la moelle

 

Comme ta peau

Ce qui rappelle ta peau

Qui disloque l’atone

Qui disloque la peine

Qui altère l’errance

Et le ricanement des secondes dans ce corps meuble où s’égraine ton absence

 

(Lire le recueil)

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